L’homosexualité dans « la Recherche »

« A la recherche du temps perdu » de Nina Companeez (film de 2011)

Inverti, Marcel Proust l’était certainement mais il ne reconnaîtra jamais ouvertement la vraie nature de ses penchants. Il a toujours été tourmenté par son homosexualité, état qui était très mal accepté par la société de l’époque et à plus forte raison par le milieu grand bourgeois et aristocratique qu’il fréquentait. Alors qu’il est élève au lycée Condorcet, Marcel adresse une lettre singulière à un ami dans laquelle il se décrit tel qu’il se voit.

 

« Connaissez-vous M.P. ? Je vous avouerai pour moi qu’il me déplaît un peu, avec ses grands élans perpétuels, son air affairé, ses grandes passions et ses adjectifs. Surtout il me paraît très fou ou très faux. Jugez-en. C’est ce que j’appellerai un homme à déclaration. Au bout de huit jours il vous laisse entendre qu’il a pour vous une affection considérable et sous prétexte d’aimer un camarade comme un père, il l’aime comme une femme. Il va le voir, crie partout sa grande affection, ne le perd pas un instant de vue. Les causeries sont trop peu. Il lui faut le mystère de la régularité des rendez-vous. Il vous écrit des lettres… fiévreuses. Sous couleur de se moquer, de faire des phrases, des pastiches, il vous laisse entendre que vos yeux sont divins et que vos lèvres le tentent. Le fâcheux (…) c’est qu’en quittant B qu’il a choyé, il va cajoler D, qu’il laisse bientôt pour se mettre aux pieds de E et tout de suite après sur les genoux de F. Est-ce une p…, est-ce un fou, est-ce un fumiste, est-ce un imbécile ? M’est d’avis que nous n’en serons jamais rien. »

 

Proust considérait l’homosexualité comme un enfer, une dépravation vouée obligatoirement à l’humiliation morale et physique, au contraire d’un Gide qui dépeint une « pédophilie juvénile et souriante ».  Il a toujours eu la hantise que sa mère découvre ses penchants et ce n’est qu’après la mort de ses parents qu’il s’affichera plus ouvertement avec ses amants.

Si dans la vie Proust répugnait à aborder le sujet de l’homosexualité (qu’il préfère appeler inversion) ce thème  réapparaît de manière récurrente dans  « La Recherche ».  Nombreux sont les personnages qui pratiquent l’homosexualité pourtant jamais évoquée à la première personne du singulier. Au fur et à mesure que l’on avance dans la lecture de la Recherche, on constate que presque tous les personnages ont ou ont eu des liaisons homosexuelles, les femmes certes, mais surtout les hommes et, curieusement, seul le Narrateur est étranger à ce penchant puisque Proust lui prête des qualités de grand séducteur auprès des femmes. Peut-être un clin d’œil de Proust qui avait un sens de l’humour très développé.

Parmi les invertis, le plus célèbre de « la Recherche » il faut citer le baron de Charlus, l’un  des acteurs principaux de « Sodome et Gomorrhe », mais il y en a tant d’autres. L’homosexualité est si répandue dans le milieu dans lequel évolue le narrateur que même Françoise, la fidèle servante de la famille, paysanne pleine de bon sens, finit par considérer que, ma foi, l’homosexualité pouvait être considérée comme « une coutume que son universalité rendait respectable » !

Françoise qui avait déjà vu tout ce que M. de Charlus avait fait pour Jupien et tout ce que Robert de Saint-Loup faisait pour Morel n’en concluait pas que c’était un trait qui reparaissait à certaines générations chez les Guermantes, mais plutôt – comme Legrandin aimait beaucoup Théodore – elle avait fini, elle personne si morale et si pleine de préjugés, par croire que c’était une coutume que son universalité rendait respectable. Elle disait toujours d’un jeune homme, que ce fût Morel ou Théodore  : « il a trouvé un Monsieur qui s’est toujours intéressé à lui et qui lui a bien aidé. « Et comme en pareil cas les protecteurs sont ceux qui aiment, qui souffrent, qui pardonnent, Françoise, entre eux et les mineurs qu’ils détournaient, n’hésitait pas à leur donner le beau rôle, à leur trouver « bien du cœur ». Elle blâmait sans hésiter Théodore qui avait joué bien des tours à Legrandin, et semblait pourtant ne pouvoir guère avoir de doutes sur la nature de leurs relations car elle ajoutait  : « Alors le petit a compris qu’il fallait y mettre du sien et y a dit  : prenez-moi avec vous, je vous aimerai bien, je vous cajolerai bien, et ma foi ce monsieur a tant de cœur que bien sûr que Théodore est sûr de trouver près de lui peut-être bien plus qu’il ne mérite, car c’est une tête brûlée, mais ce Monsieur est si bon que j’ai souvent dit à Jeannette (la fiancée de Théodore)  : « Petite, si jamais vous êtes dans la peine, allez vers ce Monsieur. Il coucherait plutôt par terre et vous donnerait son lit. Il a trop aimé le petit Théodore pour le mettre dehors, bien sûr qu’il ne l’abandonnera jamais. » (TR 700/7)

Nous citons ci-dessous les personnages de « la Recherche » présentés par l’auteur comme des personnes inverties franchement déclarées ou bien comme ayant ou ayant pu avoir à certains moments de leur vie une attirance pour l’inversion comme aimait l’appeler pudiquement Proust.

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L’indice entre parenthèse proposé à la fin de chaque extrait renvoie  aux collection la Pléïade (édition 1954) et Folio (édition 1988). A titre d’exemple, (TR 700/7) indique que l’on pourra retrouver l’extrait dans le livre « Le temps retrouvé » à la page 700 de la Pléiade et à la page 7 de la collection Folio.
Les abréviations retenus pour chacun des sept livres sont : Swann, JF, Guer, SG, Pris, Fug, TR.

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Aimé (le maître d’hôtel à Balbec)

Un brève allusion du Narrateur dans le Coté de Guermantes, peut laisser à penser qu’Aimé, le maître d’hôtel du Grand Hôtel de Balbec pouvait entretenir des relations homosexuelles avec certains clients.

Magnétisé lui-même par son contact avec le puissant aimant de Balbec, ce maître d’hôtel devenait à son tour aimant pour moi. J’espérais en causant avec lui être déjà en communication avec Balbec, avoir réalisé sur place un peu du charme du voyage. (Guer 152/145)

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Albertine

Albertine est l’un des personnages principaux de « la Recherche ».  Le narrateur la remarque lors d’un séjour à Balbec au milieu d’un groupe de « jeunes filles en fleurs » et en tombe amoureux. Bien vite il est pris d’un terrible doute à la suite d’une remarque du docteur Cottard. Albertine éprouve-t-elle une attirance pour les femmes. Cette interrogation va le poursuivre longtemps. Il ne cesse de harceler la jeune fille pour connaître la vérité, il a l’impression que la jeune fille la lui cache ou l’aménage selon ses caprices car ses réponses sont pleines de contradictions ce qui l’inquiète et alimente sa jalousie. 

Aquarelle de Bernard Soupre

Co-auteur de « Proust érotique » paru aux éditions Du Palio

 

Maintenant je [le narrateur] comprenais ce que Robert avait voulu me dire chez la princesse de Guermantes :  » C’est malheureux que ta petite amie de Balbec n’ait pas la fortune exigée par ma mère, je crois que nous nous serions bien entendus tous les deux.  » Il avait voulu dire qu’elle était de Gomorrhe comme lui de Sodome, ou peut-être, s’il n’en était pas encore, ne goûtait-il plus que les femmes qu’il pouvait aimer d’une certaine manière et avec d’autres femmes. Gilberte aussi eût pu me renseigner sur Albertine. (Fug 684/259)

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Andrée

Le narrateur a longtemps soupçonné Albertine d’avoir entretenu des relations homosexuelles avec de nombreuses femmes mais sans jamais en avoir la preuve. Même après la disparition puis la mort d’Albertine cette pensée le taraude et  curieusement ce n’est que plus tard, alors qu’il a fait d’Andrée sa maîtresse, qu’il aura confirmation des goûts saphiques d’Albertine.

Car Andrée pouvait me dire plus de choses sur Albertine que ne m’en aurait dit Albertine elle-même. Or les problèmes relatifs à Albertine restaient encore dans mon esprit alors que ma tendresse pour elle, tant physique que morale, avait déjà disparu. Et mon désir de connaître sa vie, parce qu’il avait moins diminué, était maintenant comparativement plus grand que le besoin de sa présence. D’autre part, l’idée qu’une femme avait peut-être eu des relations avec Albertine ne me causait plus que le désir d’en avoir moi aussi avec cette femme. Je le dis à Andrée tout en la caressant. Alors sans chercher le moins du monde à mettre ses paroles d’accord avec celles d’il y avait quelques mois, Andrée me dit en souriant à demi :  » Ah ! oui, mais vous êtes un homme. Aussi nous ne pouvons pas faire ensemble tout à fait les mêmes choses que je faisais avec Albertine.  » Et soit qu’elle pensât que cela accroissait mon désir (dans l’espoir de confidences je lui avais dit que j’aimerais avoir des relations avec une femme en ayant eu avec Albertine) ou mon chagrin, ou peut-être détruisait un sentiment de supériorité sur elle qu’elle pouvait croire que j’éprouvais d’avoir été le seul à entretenir des relations avec Albertine :  » Ah ! nous avons passé toutes les deux de bonnes heures, elle était si caressante, si passionnée. Du reste ce n’était pas seulement avec moi qu’elle aimait prendre du plaisir. Elle avait rencontré chez Mme Verdurin un joli garçon, Morel. Tout de suite ils s’étaient compris. Il se chargeait, ayant d’elle la permission d’y prendre aussi son plaisir, car il aimait les petites novices, de lui en procurer. Sitôt qu’il les avait mises sur le mauvais chemin, il les laissait. Il se chargeait ainsi de plaire à de petites pêcheuses d’une plage éloignée, à de petites blanchisseuses, qui s’amourachaient d’un garçon mais n’eussent pas répondu aux avances d’une jeune fille. Aussitôt que la petite était bien sous sa domination, il la faisait venir dans un endroit tout à fait sûr, où il la livrait à Albertine. Par peur de perdre Morel, qui s’y mêlait du reste, la petite obéissait toujours, et d’ailleurs elle le perdait tout de même, car, par peur des conséquences et aussi parce qu’une ou deux fois lui suffisaient, il filait en laissant une fausse adresse. Il eut une fois l’audace d’en mener une, ainsi qu’Albertine, dans une maison de femmes à Corliville, où quatre ou cinq la prirent ensemble ou successivement. C’était sa passion, comme c’était aussi celle d’Albertine. (Fug 579/179)

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Charlus (Baron de)

M. de Charlus est un « inverti », un homosexuel, attiré par les hommes puis plus tard par les jeunes garçons, et Proust en fait un des personnages principaux de « la Recherche ».

Il cache pendant un temps sa vraie nature à son entourage puis peu à peu il assume pleinement son mode de vie et la nature de ses relations

Le narrateur découvre l’homosexualité de Charlus un jour ou le baron vient rendre visite à sa tante, Mme de Villeparisis. Il rencontre Jupien giletier de son état, dans la cour de l’hôtel particulier et le narrateur assiste de loin à la rencontre puis aux ébats des deux hommes.

 

espionnage jupin charlus

Dessin de Jacques False

Car d’après ce que j’entendis les premiers temps dans celle de Jupien et qui ne furent que des sons inarticulés, je suppose que peu de paroles furent prononcées. Il est vrai que ces sons étaient si violents que, s’ils n’avaient pas été toujours repris un octave plus haut par une plainte parallèle, j’aurais pu croire qu’une personne en égorgeait une autre à côté de moi et qu’ensuite le meurtrier et sa victime ressuscitée prenaient un bain pour effacer les traces du crime. J’en conclus plus tard qu’il y a une chose aussi bruyante que la souffrance, c’est le plaisir, surtout quand s’y ajoutent—à défaut de la peur d’avoir des enfants, ce qui ne pouvait être le cas ici, malgré l’exemple peu probant de la Légende dorée—des soucis immédiats de propreté. Enfin au bout d’une demi-heure environ (pendant laquelle je m’étais hissé à pas de loup sur mon échelle afin de voir par le vasistas que je n’ouvris pas), une conversation s’engagea. Jupien refusait avec force l’argent que M. de Charlus voulait lui donner. (SG 609/11)

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Duc de Châtellerault

En arrivant à une réception donnée par le Prince et la Princesse de Guermantes, le duc de Châtellerault se rend compte avec angoisse que l’aboyeur chargé de clamer son nom pour annoncer son arrivée n’est autre que l’inconnu avec lequel il a eu l’avant-veille une aventure amoureuse et auprès duquel, pour des raisons de discrétion il s’était fait passer pour un anglais ne parlant pas le français.

Mais dès le premier instant l’huissier l’avait reconnu. Cette identité qu’il avait tant désiré d’apprendre, dans un instant il allait la connaître. En demandant à son « Anglais » de l’avant-veille quel nom il devait annoncer, l’huissier n’était pas seulement ému, il se jugeait indiscret, indélicat. Il lui semblait qu’il allait révéler à tout le monde (qui pourtant ne se douterait de rien) un secret qu’il était coupable de surprendre de la sorte et d’étaler publiquement. En entendant la réponse de l’invité : « Le duc de Châtellerault« , il se sentit troublé d’un tel orgueil qu’il resta un instant muet. Le duc le regarda, le reconnut, se vit perdu, cependant que le domestique, qui s’était ressaisi et connaissait assez son armorial pour compléter de lui-même une appellation trop modeste, hurlait avec l’énergie professionnelle qui se veloutait d’une tendresse intime : « Son Altesse Monseigneur le duc de Châtellerault ! » (SG 636/37)

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 Courvoisier (Adalbert de)

Adalbert, apparemment parfait époux est en réalité un inverti. On le retrouve dans le bordel de Jupien sans qu’il sache que le baron de Charlus s’y trouve aussi.

D’ailleurs, il [Jupien] n’avait pas d’autre chambre à me [le narrateur] donner, son hôtel, malgré la guerre, étant plein. Celle que je venais de quitter avait été prise par le vicomte de Courvoisier qui, ayant pu quitter la Croix-Rouge de X… pour deux jours, était venu se délasser une heure à Paris avant d’aller retrouver au château de Courvoisier la vicomtesse à qui il dirait n’avoir pas pu prendre le bon train. Il ne se doutait guère que M. de Charlus était à quelques mètres de lui et celui-ci ne s’en doutait pas davantage, n’ayant jamais rencontré son cousin chez Jupien lequel ignorait la personnalité du vicomte soigneusement dissimulée. (TR 824/130)

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Esther Lévy

C’est une cousine de Bloch, l’ami de jeunesse du narrateur. Durant un séjour à Balbec, le narrateur et Albertine sont choqués par l’attitude qu’Esther a avec son amie Léa qui est une jeune actrice délurée connue pour son goût pour les femmes. Plus tard, le narrateur soupçonnera Albertine d’avoir eu des relations amoureuses avec elle.

C’était peut-être une certaine Elisabeth, ou bien peut-être ces deux jeunes filles qu’Albertine avait regardées dans la glace, au Casino, quand elle n’avait pas l’air de les voir. Elle avait sans doute des relations avec elles, et d’ailleurs aussi avec Esther, la cousine de Bloch. De telles relations, si elles m’avaient été révélées par un tiers, eussent suffi pour me tuer à demi, mais comme c’était moi qui les imaginais, j’avais soin d’y ajouter assez d’incertitude pour amortir la douleur. (Pris 85/77)

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 Prince de Foix (fils)

Le prince de Foix a hérité de son père le goût pour la gent masculine qu’il fréquente lui aussi avec une grande discrétion.

Car le prince de Foix avait pu réussir à préserver son fils des mauvaises fréquentations au dehors mais non de l’hérédité. Au reste le jeune prince de Foix resta comme son père ignoré à ce point de vue des gens du monde bien qu’il allât plus loin que personne avec ceux d’un autre. (TR 828/135)

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Prince de Foix (père)

Il fait croire à sa femme qu’il est à son cercle alors qu’il passe son temps dans le bordel pour hommes tenu par Jupien. Sa mort sera regrettée par le personnel de cette illustre maison.

En même temps qu’on croyait M. de Charlus Prince, en revanche on regrettait beaucoup dans l’établissement la mort de quelqu’un dont les gigolos disaient : « je ne sais pas son nom, il paraît que c’est un baron » et qui n’était autre que le Prince de Foix (le père de l’ami de Saint-Loup). Passant chez sa femme pour vivre beaucoup au cercle, en réalité il passait des heures chez Jupien à bavarder, à raconter des histoires du monde devant des voyous. C’était un grand bel homme comme son fils. (TR 827/135)

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 Gilberte

Après une séparation, le narrateur et Gilberte conviennent de se réconcilier. En arrivant chez elle, il aperçoit Gilberte qui s’en va au bras d’un jeune homme. La rupture amoureuse est donc consommée. De nombreuses années plus tard, Gilberte avoue au narrateur que le jeune homme était en fait une jeune fille déguisée en homme, Léa, une actrice lesbienne à la réputation sulfureuse.

Bien longtemps après cette conversation, je demandai à Gilberte avec qui elle se promenait avenue des Champs-Elysées, le soir où j’avais vendu les potiches : c’était Léa habillée en homme. Gilberte savait qu’elle connaissait Albertine, mais ne pouvait dire plus. Ainsi certaines personnes se retrouvent toujours dans notre vie pour préparer nos plaisirs ou nos douleurs. (TR 695)

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Prince de Guermantes

A l’occasion d’un déplacement en Normandie, il va passer une nuit avec Morel sans savoir d’ailleurs qui il est.

Une fois ce ne fut ni l’un ni l’autre, mais le prince de Guermantes qui, venu passer quelques jours sur cette côte pour rendre visite à la duchesse de Luxembourg, rencontra le musicien, sans savoir qui il était, sans être davantage connu de lui, et lui offrit cinquante francs pour passer la nuit ensemble dans la maison de femmes de Maineville ; double plaisir, pour Morel, du gain reçu de M. de Guermantes et de la volupté d’être entouré de femmes dont les seins bruns se montraient à découvert. (SG 1078/464)

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Jupien

Le baron Charlus rencontre Jupien dans la cour des Guermantes. C’est le coup de foudre et le début d’une longue liaison amoureuse. Jupien restera au service du baron de Charlus et le servira jusqu’à la fin de sa vie avec tendresse et abnégation.

Aquarelle de Bernard Soupre

Car d’après ce que j’entendis les premiers temps dans celle de Jupien et qui ne furent que des sons inarticulés, je suppose que peu de paroles furent prononcées. Il est vrai que ces sons étaient si violents que, s’ils n’avaient pas été toujours repris un octave plus haut par une plainte parallèle, j’aurais pu croire qu’une personne en égorgeait une autre à côté de moi et qu’ensuite le meurtrier et sa victime ressuscitée prenaient un bain pour effacer les traces du crime. J’en conclus plus tard qu’il y a une chose aussi bruyante que la souffrance, c’est le plaisir, surtout quand s’y ajoutent—à défaut de la peur d’avoir des enfants, ce qui ne pouvait être le cas ici, malgré l’exemple peu probant de la Légende dorée—des soucis immédiats de propreté. Enfin au bout d’une demi-heure environ (pendant laquelle je m’étais hissé à pas de loup sur mon échelle afin de voir par le vasistas que je n’ouvris pas), une conversation s’engagea. Jupien refusait avec force l’argent que M. de Charlus voulait lui donner. (SG 609/11)

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Léa

Actrice à la réputation sulfureuse que le narrateur rencontre à Balbec. Une des cousines de Bloch s’affiche sans retenue avec elle. On verra par la suite qu’elle a eu des aventures avec d’autres femmes parmi lesquelles Andrée.

 A vrai dire les sœurs de Bloch, à la fois trop habillées et à demi-nues, l’air languissant, hardi, fastueux et souillon ne produisaient pas une impression excellente. Et une de leurs cousines qui n’avait que quinze ans scandalisait le casino par l’admiration qu’elle affichait pour Mlle Léa, dont M. Bloch père prisait très fort le talent d’actrice, mais que son goût ne passait pas pour porter surtout du côté des messieurs.  (JF 903/465)

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Monsieur Legrandin

Homme au dessus de tout soupçon et pourtant on apprend dans « le Temps retrouvé » par la bouche de Françoise qu’il a eu des relations homosexuelles avec Théodore qui était tout à la fois chantre et garçon épicier à Combray

Elle [Françoise] blâmait sans hésiter Théodore qui avait joué bien des tours à Legrandin, et semblait pourtant ne pouvoir guère avoir de doutes sur la nature de leurs relations car elle ajoutait  : « Alors le petit a compris qu’il fallait y mettre du sien et y a dit  : prenez-moi avec vous, je vous aimerai bien, je vous cajolerai bien, et ma foi ce monsieur a tant de cœur que bien sûr que Théodore est sûr de trouver près de lui peut-être bien plus qu’il ne mérite, car c’est une tête brûlée, mais ce Monsieur est si bon que j’ai souvent dit à Jeannette (la fiancée de Théodore)  : « Petite, si jamais vous êtes dans la peine, allez vers ce Monsieur. Il coucherait plutôt par terre et vous donnerait son lit. Il a trop aimé le petit Théodore pour le mettre dehors, bien sûr qu’il ne l’abandonnera jamais. » (TR 700/7)

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Femme de chambre de Mme Putbus

C’est la sœur de Théodore le chantre et garçon épicier de Combray. Saint-Loup parle d’elle au narrateur en lui vantant sa jeunesse et sa beauté et en lui précisant qu’elle a un penchant pour les femmes et fréquente les bordels.

De quoi parlions-nous ? Ah ! de cette grande blonde, la femme de chambre de Mme Putbus. Elle aime aussi les femmes, mais je pense que cela t’est égal ; je peux te dire franchement, je n’ai jamais vu créature aussi belle. Je me l’imagine assez Giorgione « —Follement Giorgione ! Ah ! si j’avais du temps à passer à Paris, ce qu’il y a de choses magnifiques à faire ! Et puis, on passe à une autre. Car pour l’amour, vois-tu, c’est une bonne blague, j’en suis bien revenu. (SG 695/94)

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Morel  Charles

C’est un jeune homme ambitieux, arriviste et sans scrupule.  Excellent musicien, il est régulièrement invité chez les Verdurin pour y jouer du violon. Il y rencontre le Baron de Charlus qui tombe amoureux de lui. Les relations entre les deux hommes sont tumultueuses et Morel sans scrupule et infidèle et le fait beaucoup souffrir. Bisexuel Morel se conduit avec les femmes avec autant de cynisme et de cruauté qu’avec les hommes.

Mon indignation fut plus grande quand, en arrivant à la maison où logeait Morel, je reconnus la voix du violoniste, lequel, par le besoin qu’il avait d’épandre de la gaîté, chantait de tout cœur : « Le samedi soir, après le turrbin ! » Si le pauvre M. de Charlus l’avait entendu, lui qui voulait qu’on crût, et croyait sans doute, que Morel avait en ce moment le coeur gros ! Charlie se mit à danser de plaisir en m’apercevant. (SG 1065/452)

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Nissim Bernard

Grand oncle de l’ami du narrateur Albert Bloch.  Alors qu’il loue une somptueuse villa pour lui et pour sa famille, il prend tous ses déjeuners au Grand-Hôtel ou il entretient un jeune commis de l’hôtel ce qui choque sa famille et son entourage qui ne sont pas dupes. Bientôt il tromper le jeune commis avec un garçon de ferme qui a un frère jumeau. La ressemblance des deux frères est source de quiproquos cocasses.

Non loin de nous était M. Nissim Bernard, lequel avait un oeil poché. Il trompait depuis peu l’enfant des choeurs d’Athalie avec le garçon d’une ferme assez achalandée du voisinage, « Aux Cerisiers ». Ce garçon rouge, aux traits abrupts, avait absolument l’air d’avoir comme tête une tomate. Une tomate exactement semblable servait de tête à son frère jumeau. Pour le contemplateur désintéressé, il y a cela d’assez beau, dans ces ressemblances parfaites de deux jumeaux, que la nature, comme si elle s’était momentanément industrialisée, semble débiter des produits pareils. Malheureusement, le point de vue de M. Nissim Bernard était autre et cette ressemblance n’était qu’extérieure. La tomate n° 2 se plaisait avec frénésie à faire exclusivement les délices des dames, la tomate n° 1 ne détestait pas condescendre aux goûts de certains messieurs. Or chaque fois que, secoué, ainsi que par un réflexe, par le souvenir des bonnes heures passées avec la tomate n° 1, M. Bernard se présentait « Aux Cerisiers », myope (et du reste la myopie n’était pas nécessaire pour les confondre), le vieil Israélite, jouant sans le savoir Amphitryon, s’adressait au frère jumeau et lui disait : « Veux-tu me donner rendez-vous pour ce soir. » Il recevait aussitôt une solide « tournée ». (SG 855/248)

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Odette

Demie mondaine à la vie amoureuse très agitée, elle devient la femme de Charles Swann mais des âmes peu charitables se chargent de révéler à celui-ci son passé sulfureux.

Un jour il reçut une lettre anonyme, qui lui disait qu’Odette avait été la maîtresse d’innombrables hommes (dont on lui citait quelques-uns parmi lesquels Forcheville, M. de Bréauté et le peintre), de femmes, et qu’elle fréquentait les maisons de passe. Il fut tourmenté de penser qu’il y avait parmi ses amis un être capable de lui avoir adressé cette lettre (car par certains détails elle révélait chez celui qui l’avait écrite une connaissance familière de la vie de Swann)… (Swann 356/293)

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Robert de Saint-Loup

Robert de Saint-Loup a épousé Gilberte, la fille de Swann et d’Odette. Malgré l’attitude souvent odieuse de Saint-Loup vis-à-vis de sa femme, le ménage tient toujours cahin-caha. Gilberte connaît-elle les penchants de son mari pour les hommes. En tout cas elle feint de les ignorer. Le narrateur a confirmation des mœurs homosexuelles de Saint-Loup et s’aperçoit que ses goûts pour les hommes sont très anciens. En effet, il apprend avec étonnement de la bouche d’Aimé le maître d’hôtel du Grand-Hôtel de Balbec que Saint-Loup a eu dans sa jeunesse une aventure avec un jeune liftier, aventure qui faillit mal tourner.

Or Aimé me parla à ce moment d’un temps bien plus ancien, celui où j’avais fait la connaissance de Saint-Loup par Mme de Villeparisis, en ce même Balbec.  » Mais oui, Monsieur, me dit-il, c’est archiconnu, il y a bien longtemps que je le sais. La première année que Monsieur était à Balbec, M. le marquis s’enferma avec mon liftier, sous prétexte de développer des photographies de Madame la grand’mère de Monsieur. Le petit voulait se plaindre, nous avons eu toutes les peines du monde à étouffer la chose. (Fug 681/260)

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Duc de Sidonia

Lors d’une réception il rencontre le baron de Charlus et les deux hommes comprennent aussitôt qu’ils appartiennent au même monde des invertis.

On entendait, dominant toutes les conversations, l’intarissable jacassement de M. de Charlus, lequel causait avec Son Excellence le duc de Sidonia, dont il venait de faire la connaissance. De profession à profession, on se devine, et de vice à vice aussi. M. de Charlus et M. de Sidonia avaient chacun immédiatement flairé celui de l’autre, et qui, pour tous les deux, était, dans le monde, d’être monologuistes, au point de ne pouvoir souffrir aucune interruption. Ayant jugé tout de suite que le mal était sans remède, comme dit un célèbre sonnet, ils avaient pris la détermination, non de se taire, mais de parler chacun sans s’occuper de ce que dirait l’autre. (SG 638/39)

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Théodore

Il a plusieurs fonctions à Combray, chantre et garçon d’épicier. Il est le frère de la femme de chambre de la baronne Putbus. Coureur de jupon il ne déteste pas cependant le commerce des hommes.

Eh bien, l’année suivante, j’allai à Balbec, et là j’appris, par un matelot qui m’emmenait quelquefois à la pêche, que mon Théodore, lequel, entre parenthèses, a pour sœur la femme de chambre d’une amie de Mme Verdurin, la baronne Putbus, venait sur le port lever tantôt un matelot, tantôt un autre, avec un toupet d’enfer, pour aller faire un tour en barque et « autre chose itou « . (Pris 307/294)

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Ambassadeur de X… en France

Vieux cheval de retour, il est très attiré par les jeunes hommes et s’applique à ne recruter que des jeunes secrétaires d’ambassade.

d’après Agranska Krolik

Aussitôt M. de Vaugoubert (ce qui agaça beaucoup M. de Charlus) ne détacha plus ses yeux de ces jeunes secrétaires, que l’ambassadeur de X… en France, vieux cheval de retour, n’avait pas choisis au hasard. (SG 665/65)

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Marquis de Vaugoubert

Diplomate d’une grande médiocrité, il est connu pour le goût qu’il porte au jeune gens. Il montre une certaine habileté pour faire nommer dans sa légation, et sans aucune raison valable, des jeunes gens dénués de tout mérite.

Dieu sait de combien de lettres il assommait le ministère (quelles ruses personnelles il déployait, combien de prélèvements il opérait sur le crédit de Mme de Vaugoubert qu’à cause de sa corpulence, de sa haute naissance, de son air masculin, et surtout à cause de la médiocrité du mari, on croyait douée de capacités éminentes et remplissant les vraies fonctions de ministre) pour faire entrer sans aucune raison valable un jeune homme dénué de tout mérite dans le personnel de la légation. (SG 643/44)

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Madame Verdurin

Swann reçoit un jour une lettre anonyme accusant Odette d’avoir de nombreux amants et de coucher avec des femmes. Les informations reprises dans cette lettre le poursuivent sans cesse et certains indices l’amènent à se demander si Mme Verdurin ne serait  pas une de ces femmes. Il somme Odette de lui répondre sur ce point. Dans un premier temp celle ci ne donne qu’une réponse ambiguë puis finit par avouer.

Swann se rappela pour la première fois une phrase qu’Odette lui avait dite il y avait déjà deux ans : « Oh ! Mme Verdurin, en ce moment il n’y en a que pour moi, je suis un amour, elle m’embrasse, elle veut que je fasse des courses avec elle, elle veut que je la tutoie. » Loin de voir alors dans cette phrase un rapport quelconque avec les absurdes propos destinés à simuler le vice que lui avait racontés Odette, il l’avait accueillie comme la preuve d’une chaleureuse amitié. Maintenant voilà que le souvenir de cette tendresse de Mme Verdurin était venu brusquement rejoindre le souvenir de sa conversation de mauvais goût. Il ne pouvait plus les séparer dans son esprit, et les vit mêlées aussi dans la réalité, la tendresse donnant quelque chose de sérieux et d’important à ces plaisanteries qui en retour lui faisaient perdre de son innocence. (Swann 361/492)

…..

Dis-moi sur ta médaille, si oui ou non, tu as jamais fait ces choses.

Mais je n’en sais rien, moi, s’écria-t-elle avec colère, peut-être il y a très longtemps, sans me rendre compte de ce que je faisais, peut-être deux ou trois fois. (Swann 363/494)

 

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Vinteuil (Amie de Mlle)

Un jour le Narrateur s’est endormi au court d’une longue promenade par une journée très chaude tout près de la maison de M. Vinteuil. Il se réveille subitement et surprend Mlle Vinteuil et son amie qui échangent des caresses. C’est sa première découverte de l’homosexualité féminine.

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Egon Schiele – Couple de femmes amoureuses – 1915

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« Mademoiselle me semble avoir des pensées bien lubriques, ce soir », finit-elle par dire, répétant sans doute une phrase qu’elle avait entendue autrefois dans la bouche de son amie. Dans l’échancrure de son corsage de crêpe Mlle Vinteuil sentit que son amie piquait un baiser, elle poussa un petit cri, s’échappa, et elles se poursuivirent en sautant, faisant voleter leurs larges manches comme des ailes et gloussant et piaillant comme des oiseaux amoureux. Puis Mlle Vinteuil finit par tomber sur le canapé, recouverte par le corps de son amie. Mais celle-ci tournait le dos à la petite table sur laquelle était placé le portrait de l’ancien professeur de piano. (Swann 161/246)

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et bien d’autres encore…

Monsieur de Charlus donne une soirée dans le salon des Verdurin et l’on peut entendre des propos furtifs échangés entre lui et certains messieurs distingués.

On eût été bien étonné si l’on avait noté les propos furtifs que M. de Charlus avait échangés avec plusieurs hommes importants de cette soirée. Ces hommes étaient deux ducs, un général éminent, un grand écrivain, un grand médecin, un grand avocat. Or les propos avaient été : « A propos, avez-vous vu le valet de pied ? je parle du petit qui monte sur la voiture. Et chez notre cousine Guermantes, vous ne connaissez rien ? – Actuellement non. – Dites donc, devant la porte d’entrée aux voitures, il y avait une jeune personne blonde, en culotte courte, qui m’a semblé tout à fait sympathique. Elle m’a appelé très gracieusement ma voiture, j’aurais volontiers prolongé la conversation. – Oui, mais je la crois tout à fait hostile, et puis ça fait des façons ; vous qui aimez que les choses réussissent du premier coup, vous seriez dégoûté. Du reste, je sais qu’il n’y a rien à faire, un de mes amis a essayé. – C’est regrettable, j’avais trouvé le profil très fin et les cheveux superbes. – Vraiment vous trouvez ça si bien que ça ? Je crois que si vous l’aviez vue un peu plus, vous auriez été désillusionné. Non, c’est au buffet qu’il y a encore deux mois vous auriez vu une vraie merveille, un grand gaillard de deux mètres, une peau idéale, et puis aimant ça. Mais c’est parti pour la Pologne. – Ah ! c’est un peu loin. – Qui sait ? ça reviendra peut-être. On se retrouve toujours dans la vie.  » Il n’y a pas de grande soirée mondaine, si, pour en avoir une coupe, on sait la prendre à une profondeur suffisante, qui ne soit pareille à ces soirées où les médecins invitent leurs malades, lesquels tiennent des propos fort sensés, ont de très bonnes manières, et ne montreraient pas qu’ils sont fous s’ils ne vous glissaient à l’oreille, en vous montrant un vieux monsieur qui passe : « C’est Jeanne d’Arc. « (Pris 243/232)

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21 réflexions sur « L’homosexualité dans « la Recherche » »

  1. Article intéressant mais son préambule m’oblige à vous laisser une note.
    Céleste, dans un livre d’entretien, ne fait pas état d’une homosexualité avérée de M. Proust. Quant à cette lettre exhumée d’une conversation privée (domaine où l’on sait que chacun aime choquer, dire des bêtises, rire de soi, etc…) ne prouve absolument rien.
    Auriez vous quelque preuve plus tangible à nous fournir ?

    Amicalement, et vive la littérature !

    • Je ne suis pas certain d’avoir compris votre commentaire.
      Sur le premier point évoqué, en effet, Céleste repousse à deux ou trois reprises l’idée que Proust soit homosexuel ce qui est d’autant plus étonnant qu’elle a vécu durant des années dans son intimité. Cette « inversion » était connue de tous et d’ailleurs Proust n’en faisait pas mystère surtout après la mort de ses parents.
      Concernant votre demande de preuves tangibles, je vous suggère de vous reporter aux centaines de livres et articles en tous genres publiés depuis près d’un siècle sur le personnage.
      En outre, je vous rappelle que j’ai écrit un article sur « l’homosexualité dans la Recherche » et non pas sur l’homosexualité de Marcel Proust.
      Amitiés

    • Le , Josette Jouve- Ygrié 1 côte du Catelmas. Auxillac - La Canourgue48500 a dit :

      J’ai très bien connu Céleste que je rencontrais tous les étés dans son village d’Auxillac où je passais une partie de mes vacances . Je la rencontrais aussi à Méré. Je peux dire que je ne l’ai jamais vu changer d’attitude lorsque je lui parlais de l’homosexualité de Proust. Elle restait silencieuse à ce sujet que je sentais être totalement tabou. Plusieurs fois je la voyais baisser les yeux lorsque je lui rappelais que Proust ne cachait pas sa relation avec son chauffeur Agostini dont il disait  » que c’était l’homme qu’il avait le plus aimé  » . Ce sujet la gênait vraiment et il l’était dans nos campagnes. Elle me disait que lorsque des visites ne lui plaisaient pas elle répondait « que Proust se reposait » et qu’au cours des années de présence chez Proust  » elle n’avait jamais soupçonné quelque chose qui ferait penser à cela » . Ce qu’elle dira à l’auteur de Monsieur Proust. D’autre part je pense que Céleste ne connaîssait pas la liberté des salons littéraires que fréquentait Proust ou ne voulait pas imaginer des relations qui auraient terni l’image qu’elle se faisait du Maître. Quand elle est arrivée à Paris elle me racontait :  » qu’elle n’imaginait pas que des choses pareilles existent ». C’est la seule allusion que je connaîsse de Céleste.

        • Que proust ait aimé agostinelli ne prouve pas que celui-ci hétérosexuel ait eu une liaison avérée avec proust tout prouve le contraire traite et en dehors du fait que proust a horreur de la pénétration et de la pédérastie de charlus la lettezcque vous oubliez confirme le caractère de ses relations avec ses amis plus platoniques que l »on pense et le caractère dans doute infantile de ses pratiques dont témoigne même un célèbre passage de la recherche ; il faut ajouter que l’homosexualité comme categorie est une invention contemporaine de proust notion de sexologues Allemands bien éloigné de l’univers de proust …je t’envoie d’ailleurs à Foucault pour cette invention de l’homosexualité par opposition aux pratiques sexuelles d’avant

  2. Bravo pour votre site , très bien documenté et très clair qui peut aider beaucoup des admirateurs de Proust .
    Par contre pour être dans la vérité , êtes vous sur de l’affirmation :
    « qu’après la mort de ses parents il s’affichera plus ouvertement avec ses amants. » ?
    avez vous recherché des preuves (à part des allégations ) que ce fut vraiment ses amants et non des amis ?j’en ai cherché sans en trouver .
    Certains biographes allèguent qu’il avait des amants par supposition , car il eu des correspondances tendres avec des amis .
    Si son penchant d’inverti ne fait aucun doute , ni ses amitiés tendres avec des hommes , rien ne prouve qu’il se soit laissé aller aux rapport sexuels avec aucun d’eux (donc qu’on puisse le traiter ouvertement d’homosexuel) , merci de nous prévenir si vous avez des informations plus tangibles .

    On sait qu’il a eu une amitié tendre et passionné avec Reynaldo Hahn , qu’ils sont allés ensemble en Bretagne mais ou sont les preuves qu’ils ont eu des relations sensuelles?
    on sait aussi qu’il n’en n’a pas eu avec Lucien Daudet (il se bat même en duel avec Jean Lorrain, après des insinuations sur ses moeurs d’avec Lucien Daudet) , il est peu probable que si leur amitié avait été sensuelle il n’aurait pas essayer de réparer son honneur avec autant de passion , vu sa santé fragile .
    Pareil avec Bertrand de Fénélon avec lequel il n’y a aucune preuve de sensualité homosexuelle agie dans leur relation.
    Ensuite il y a eu ses chauffeurs et autres employés , mais là encore qui nous dit qu’il y ait plus que des sentiments ?

    Le plus probable vue le manque de preuve est que Proust a été tourmenté toute sa vie par son inversion et que si il a eu des passions et amitiés tendres , elles n’ont jamais été consommées physiquement .

    • Ne trouvant pas le lien pour laisser un commentaire libre, j’en réponds a ce dernier.

      Personellement, je pense que il faut connaitre de très proche l’univers homossexuel pour en décrire a détail les systèmes et les codes avec autant de veracité.
      De plus s’il parait qu’il faut faire épreuve documentale d’une homossexualité de Proust… bien! si l’on essayait de faire du même sur sa heterossexualité, on aurait conclu qu’il était assexuel.

      En plus le dernier commentaire s’équivoque au moment ou il établi une difference entre nature et action. Il est vrai que un voleur en potence ne deviant pas voleur lorsqu’il commet l’act de voler. Un voleur ne l’est pas sans voler. Par définition, voleur est celui qu vole.
      Cependant ni l’homossexuel ne le devient que quand il commets un acte sexuel, ni – au contraire du vouleur – étre homo ou pratiquer la sexualité homo est un crime, ou quelque chose de offensif, ou moins digne que toute autre nature. C’est sa liberté
      .
      Mais sans doute que les héteros qui sont vièrges, dont j’en connais moi même des soeurs au couvents et une vielle tante qui n’était ni « débochée » (dans ses propres mots) ni voulait marrier avec un autre que celui qui l’a réfusée, en sont moins hétéros ou pas héteros que ceux qui ont eu des rapports heterossexuels.
      C’est le même pour l’homosexualité. avoir des sentiments, des désir, etc. est de la nature. Ne pas les faire physiquement, est accessoire et de moindre importance pour la nature de la personne.

      Moi même je n’ai jamais comis l’adultère mais si je raccontait a ma femme que je l’ai essayé et pourtant, encore aujourd’hui j’en pense souvent, j’en suis sure qu’elle n’aurait pas votre opinion sur la difference entre être et faire.

      Homo ou pas, il est toujours un beau exercise de ne pas questioner le préambule. C’est une opinion accepté dans le moyen académique et un détail sur l’auteur. Quelqu’un acceptant un Proust hetero et nyant la possibilité d’une autre nature sexuelle, a tort a ne pas accepter la liberté personelle d’un autre.

      En ce qui concerne le avant-dernier témoin, il me révele beaucoup plus sur Céléste et sa bonne conduite que sur la sexualité de Proust. Si Céleste barrait l’accés a des gens qui « ne lui plaissaient pas » ( dans un contexte de la conversation sur la sexualité de Proust) c’est l’épreuve qu’elle en savait d’avantage de toutes « ces choses pareilles ».
      Je suppose d’ailleurs que les salons n’avaient pas autant de liberté car la sexualité hors norme y étaient rarement affichée.

      Célèste a été neanmoins beaucoup plus polie en repondant quelque chose de ce genre ( que j’en suis sure d’être la verité du sens strict des phrases mêmes) par rapport a la grande indiscrétion d’un « étranger » poser des questions intimes sur nos proches (se voir en été, c’est une chose; être intime est une autre).

      Personellement, homo ou pas, pratiquant de la homossexualité ou pas, l’ouvrage révele beaucoup plus sur la nature homossexuelle qu’elle nous révèlle sur la nature masculine hétéro.
      Très probablement, l’auteur en était homo.
      Très probablement, il était « tourmenté toute sa vie pour son inversion » pas pour la nature emotionelle de l’amour pour un homme, ni pour le act sexuelle, mais pour le jugement de l’homossexualité des gens et l’honte qui en dérive pour certains ( pour certains homos, pour certains de ses familiers). Tout cela a cause des gens qui, encore aujourd’hui font d’une véemente défense de Proust « non-homossexuel ».

      Bonne journée et felicitations pour le travail. Le recueil des phrases par personnage est très instructif et aussi récreatif. Que de belle syntaxe, une grammaire irreprochable, un ésprit merveilleu et un humour très intéliggent. Très très grande litterature.
      Merci

        • Je crois que vous vous laissez piéger par la notion moderne qui a défini une identité homosexuelle qui n’existait pas à l’époque de la renaissance par ex les hommes n’étant pas définis par leur sexualité

  3. Quant à moi, je ne doute pas de l’homosexualité de Proust. Bien sûr, d’abord parce qu’elle l’obsède et qu’il sait manifestement bien de quoi il parle. Ensuite, parce que, en miroir, il n’a pas l’air de bien savoir comment se passent les relations physiques entre hommes et femmes… Vous avez relevé que Marcel se vante dans la Recherche d’avoir tombé une douzaine de filles en même temps qu’Albertine. (J’avoue que j’ai souri quand j’ai lu ça dans les Filles en fleur.) Le héros se décrit maladif et chétif, c’est-à-dire exactement le genre de personnes qui n’attire pas du tout les demoiselles : il devrait avoir beaucoup de chance d’en séduire une seule ! Proust n’est ici pas crédible une seconde. Dans toutes ses relations « hétérosexuelles » dans la Recherche, l’auteur oublie d’ailleurs ce petit détail qui existe avec les femmes et qui s’appelle une grossesse, détail qui fait que celles-ci ne se donnent pas comme ça… contrairement aux invertis qui n’ont pas à se préoccuper de ce souci et, pour certains d’entre eux, multiplient ainsi les rencontres amoureuses sans jamais y penser, comme le fait notre Marcel. Autre point qui m’a fait rire, je crois que c’est dans Swann, le petit Marcel s’est fait dépucelé par une cousine. Certes, cela existe, mais c’est extrêmement rare et il est beaucoup plus fréquent que ce soit un cousin, voir un tonton, qui initie un gamin à l’homosexualité. J’ai même lu ce bref passage (quand Proust est ennuyé parce qu’il ne sait pas de quoi il parle, il élude) comme biographique et je ne doute guère que le tout jeune Marcel a connu ses premiers émois homosexuels avec un de ses cousins.

  4. Bonjour ,

    Pour répondre à Mario , il n’y a pas de doute sur le fait que Proust ait eu une attirance pour les hommes et non pour les femmes , mais le terme homosexuel est impropre et ne convenait à Proust pour la raison qu’il suppose des relations intimes entre hommes .Cela peut alors paraître comme trahison de le qualifier ainsi , surtout que Proust à toujours montré un certain dégoût pour les rapports sexuels entre hommes .Il décrit les rapports physiques entre hommes comme une perversion ,avec une composante sado-masochiste qu’il tourne en ridicule dans son œuvre . Mr de Charlus est pitoyable et dominé par ses pulsions destructrices qui ne le rendent pas heureux mais prisonnier :c’est un joug qu’il subit .

    Pensez vous qu’il ridiculiserait et condamnerait ainsi les pratiques sexuelles entre hommes si’ il s’y était adonné ?
    Je le crois sincère dans son dégoût parce qu’il y a énormément de preuves en ce sens et aucune pour étayer le fait qu’il ait eu des amants qui ne soient pas uniquement des camarades de jeux, amis de cœur …

    C’est pour cela que Iman Bassalah qui s’est documenté sur la sexualité des grands écrivains (et a écrit un livre sur le sujet) parle au début de sa vie d’une homosexualité refoulée chez Proust (non agie) car elle n’a pas trouvé de preuve de quelconque actes sexuel (sodomie) et souligne que lorsqu’il passe ses nuits dans des maisons closes pour hommes, il reste voyeur et ne participe jamais et continue jusqu’à la fin à assurer à ses proches qu’il y va effectuer des recherches pour enrichir ses personnages .Il assure à ses amis son dégoût pour les pratiques entre hommes , pourquoi mettre sa parole en doute ?
    Si Iman Bassalah dit ensuite que Proust aurait eu des amants après le décès de sa mère elle n’amène aucun renseignement précis , c’est juste un copié des biographes avant elle qui ont supposé que …sans apporter l’ombre d’une preuve …

    L’étude de sa vie et de son œuvre montre plutôt que Proust était chaste et qu’il avait des amitiés masculines passionnées , ca ne fait pas de lui un homosexuel, il n’aurait d’ailleurs pas aimé qu’on le qualifie ainsi.
    Par ex il écrit :
    « « Du coup, quelle tentation pour le malade de renoncer à ces deux résurrecteurs, l’eau et la chastetél  »

    Et dans cette lettre au fils de sa logeuse il avoue n’avoir aucune libido , et tient à ce qu’on le sache  :

    « Les voisins dont me sépare la cloison font d’autre part l’amour tous les deux jours avec une frénésie dont je suis jaloux. Quand je pense que pour moi cette sensation est plus faible que celle de boire un verre de bière fraîche, j’envie ces gens qui peuvent pousser des cris tels que la première fois j’ai cru à un assassinat. Mais bien vite le cri de la femme repris une octave plus bas par l’homme, m’a rassuré sur ce qui se passait. […] Je serais désolé que Madame votre mère m’attribuât tout ce boucan, qui doit être entendu jusqu’à des distances aussi grandes que ce cri des baleines amoureuses que Michelet montre dressées comme les deux tours de Notre-Dame. […] Je vous prie réhabilitez-moi auprès de Madame votre mère pour l’amour et pour le piano. Je ne connais que l’asthme. »

    Mais ne pas avoir de désir sexuel n’empêche pas d’avoir des inclinations, des aventures qui provoquent des souffrances et des jalousies.

    La psychanalyste Isée Bernateau qui a consacrée une étude intitulée « De l’impuissance à la toute-puissance : Proust et l’horreur de la pénétration  » soutient après analyse de son œuvre que

    « Le plus saillant est qu’il s’agit d’une sexualité essentiellement masturbatoire, dont il semble ‒ et sur ce point tous les commentateurs se rejoignent ‒, que la pénétration, active ou passive, ait été radicalement écartée. Si l’on s’en tient à la définition psychiatrique, Marcel Proust fut donc un impuissant primaire, « jamais parvenu au coït, ni avec une femme ni avec aucun autre partenaire sexuel » (Bourguignon, 1973, p. 21). Ysée Bernateau  »

    tout ca parce qu’il était coincé dans un complexe d’Oedipe avec une mère possessive et un père complaisant :un petit garçon qui n’a jamais pu sortir de l’emprise de sa maman .

    Il est donc probable donc que Proust vivait sa vie relationnelle comme un enfant ,il avait la photo de sa mère (ou de femme jouant le rôle de substitution de mère ) toujours sur lui ;Sa mère était son grand amour dont il essaya toute sa vie de se détacher symboliquement pour pouvoir grandir .
    Toute son œuvre montre que la vie onirique et symbolique comptait le plus pour lui que ,il avait un corps chétif et malade et peu de libido .
    Il était plus porté à l’introspection que sur les élans du corps, sa nature le portait plus à jouir du plaisir masochiste de la masturbation mentale .

    Pourquoi est-ce si important de différentier orientation sexuelle et sexualité agie ?

    Parce que si Proust n’avait pas été empêché par sa mère d’ accéder à la maturité sexuelle avec une femme dans un coit épanouissant il n’aurait pas eu la faille nécessaire pour écrire cette œuvre si fascinante (fascinante parce qu’elle nous parle de sa névrose et que nous sommes concernés ).Si il avait eu un physique d’athlète et s’était éclaté sexuellement , il n’aurait pas eu d’homme tourmenté ni d’oeuvre .
    Que Alerbetine soit Albert a peu d’importance ce qui compte est que Proust était empéché de rapport physique et qu’il a essayé toute sa vie de s’extirper de ce drame et qu’il a sublimé en quelques sorte son impuissance dans une œuvre créatrice qui lui a servit d’exutoire.
    C’est pour celà que la bisexualité est présente dans ses personnages qui ont un sexe le plus souvent indifférencié , une sorte d’hermaphrodisme:ce qui fait dire entre autre , à l’auteur Marie Miguet-Ollagnier dans « la mythologie de Marcel Proust  » que l’oeuvre de Proust témoigne d’une quête vers la lumière , pour l’aboutissement du rêve de l’androgyne (être parfait réalisé), c’est sa façon à lui de sublimer .

  5. Alfred agostinelli … chauffeur de proust ..décédé dans un accident d ´ avion ,dont proust était secrètement amoureux … agostinelli lui meme heterosexuel n ´a sûrement jamais eu de relation sexuelles avec proust … Simple fantasme platonique de proust envers son chauffeur , beaucoup plus jeune que lui , et tres beau

  6. Qu’il ait été homo pratiquant ou non, qui sait? Quoiqu’il en soit, il parait que MP partageait un mythe commun: que la plupart des hommes sont ou homosexuel ou bisexuel. Les recherches récentes démontrent qu’il s’agit d’une minorité, 10% peut-être.
    Autre chose qui me frappe, en ce qui regarde les rapports entre le narrateur et Albertine: en tant qu’ennuyeux qui ne s’est jamais senti attiré qu’aux femmes, je constate que personnellement j’aurais été beaucoup moins troublé, meme un peu excité, par un rapport lesbien de ma femme ou amie, que par une liaison avec un homme. J’ai l’impression que que cet attitude est assez commun chez les hommes (et les femmes?) hétérosexuels – Freud aurait peut-être prétendu qu’il s’agit d’un désir secret de coucher avec la troisième. De plus, on sait que les sites pornos lesbiens sont plus fréquentés par les hommes que par les femmes. Somme tout, la jalousie du narrateur, presqu’ exclusivement a l’égard des rapports lesbiens d’Albertine (hors une seule occasion d’une soirée avec Saint-Loup) est encore une indication de plus qu’en réalité, il s’agit ici d’un amour homosexuel camouflé.

  7. Je crois me souvenir d’un passage dans lequel le Narrateur avoue sa curiosité de savoir ce qui se passe entre deux femmes. Ce qui irait dans le sens de l’ignorance du physique par Proust (certes bien indirectement). Quel est donc ce passage ?

  8. Pour tenter de répondre à la question d’Aurellyen ci-dessus, je crois que le passage auquel il se réfère est celui de La Fugitive, dans lequel Le Narrateur, d’une façon très perverse dit à Andrée avec front, après avoir insinué que depuis bien longtemps il était au courant des rapports saphiques qu’elle avait avec Albertine (il ment, bien entendu). : « Je dis à Andrée que c’eût été une grande curiosité pour moi si elle avait voulu me laisser la voir (même simplement en caresses qui ne la gênassent pas trop devant moi) faire cela avec celles des amies d’Albertine qui avaient ces goûts, et je nommai Rosemonde, Berthe, et toutes les amies d’Albertine, pour savoir ». A la page suivante, histoire de mystifier plus encore le lecteur sur ses appétences, ses inclinations et son androgynie, le Narrateur précise : « A ce moment je m’aperçus dans la glace : je fus frappé d’une certaine ressemblance entre moi et Andrée. Si je n’avais pas cessé depuis longtemps de raser ma moustache et si je n’en avais eu qu’une ombre, cette ressemblance eût été presque complète ».

    Tout ce passage, à défaut de nous éclairer plus sur l’identité sexuelle du Narrateur–laquelle est mystifiante au-delà de tout ce que les mots peuvent exprimer–, nous illumine à plus d’un égard sur la mystifiante ambiguité sexuelle de l’auteur dont la soi-disant homosexualité, est un extraordinairement complexe mélange exquis, délicieux, défiant tout ce que l’on peut imaginer, qu’il partage d’ailleurs avec son Narrateur, de voyeurisme, de pédophilie, de sadisme, d’olfactophilie, de nasophilie, d’hébéphilie, de fétichisme, de dacryphilie, d’asthénéophilie, d’agalmatophilie, et d’autres tendances paraphiliaques, tout, excepté de l’homosexualité comme vous et moi la concevons. Mais peut-être n’ai-je point répondu adéquatement à la question?

    • Merci pour votre réponse. Je pense qu’en effet vous avez répondu à Aurellyen… mais notre cher Marcel est parfois si alambiqué !
      J’ai apprécié également la longue suite d’adjectifs dont certains m’étaient inconnus.

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