La salle à manger du Grand-Hôtel

La salle à manger du Grand Hôtel

d’après Bernard Soupre (proustenaquarelles.com)

 

Le soir, à la nuit tombée, les ouvriers, pêcheurs et petits bourgeois de Balbec se pressent derrière les vitres du restaurant du Grand-Hôtel comme des insectes autour d’un point lumineux pour observer la vie luxueuse de la clientèle et le narrateur se demande si  ces pauvres gens démunis accepteront toujours de rester les spectateurs d’une telle inégalité sociale.


Dessins de Stéphane Heuet – A l’ombre des jeunes filles en fleurs – Vol 1 pages 20 et 21 – Delcourt 

Et le soir ils ne dînaient pas à l’hôtel où, les sources électriques faisant sourdre à flots la lumière dans la grande salle à manger, celle-ci devenait comme un immense et merveilleux aquarium devant la paroi de verre duquel la population ouvrière de Balbec, les pêcheurs et aussi les familles de petits bourgeois, invisibles dans l’ombre, s’écrasaient au vitrage pour apercevoir, lentement balancée dans des remous d’or la vie luxueuse de ces gens, aussi extraordinaire pour les pauvres que celle de poissons et de mollusques étranges : (une grande question sociale, de savoir si la paroi de verre protégera toujours le festin des bêtes merveilleuses et si les gens obscurs qui regardent avidement dans la nuit ne viendront pas les cueillir dans leur aquarium et les manger). (JF  681/249)

8 réflexions sur « La salle à manger du Grand-Hôtel »

  1. Justement je travaille sur ce passage en stylistique et je dois faire un plan de 2 ou 3 parties suivi de sous partie.
    Si quelqu’un peut m’aider ce serait gentil. 🙂

  2. Bonjour,

    A partir de ces extraits et de cette carte postale, nous éditons un livre sur l’histoire de l’hôtellerie et de la restauration dans l’oeuvre de Proust.

    Cordialement,

    Gil Galasso
    Docteur en histoire
    Meilleur Ouvrier de France Maître d’hôtel

    • Je serais heureux d’être tenu au courant de l’avancement de ce projet. J’espère que vous n’oublierez pas le bœuf en gelée de Françoise.

    • Ce passage est extrait de « A l’ombre des jeunes filles en fleurs » collection la Pléiade 1954 page 681 ou collection Folio page 249.

    • je le cherche en vain dans JFF (A l’ombre des j filles en fleurs) ;
      qui peut me renseigner sur M. Cambremer exigeant de la grand- mère et du Narrateur qu’ils leur rendent sa table dans la salle à manger du Grand Hotel de Balbec ?

      • Je pense que vous faites une erreur. Il ne s’agit pas de M de Cambremer mais de M.de Stermaria qui ne tolère pas que sa table habituelle ait été donnée au Narrateur et à sa grand-mère.

        « M. et Mlle de Stermaria dont on nous avait fait donner la table croyant qu’ils ne rentreraient que le soir. Venus seulement à Balbec pour retrouver des châtelains qu’ils connaissaient dans le voisinage, ils ne passaient dans la salle à manger de l’hôtel, entre les invitations acceptées au dehors et les visites rendues que le temps strictement nécessaire. C’était leur morgue qui les préservait de toute sympathie humaine, de tout intérêt pour les inconnus assis autour d’eux, et au milieu desquels M. de Stermaria gardait l’air glacial, pressé, distant, rude, pointilleux et malintentionné, qu’on a dans un buffet de chemin de fer au milieu de voyageurs qu’on n’a jamais vus, qu’on ne reverra pas, et avec qui on ne conçoit d’autres rapports que de défendre contre eux son poulet froid et son coin dans le wagon. A peine commencions-nous à déjeuner qu’on vint nous faire lever sur l’ordre de M. de Stermaria, lequel venait d’arriver et sans le moindre geste d’excuse à notre adresse, pria à haute voix le maître d’hôtel de veiller à ce qu’une pareille erreur ne se renouvelât pas, car il lui était désagréable que « des gens qu’il ne connaissait pas » eussent pris sa table ». (Jeunes filles, folio classique 1988, page 248)

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